PAROLES d'EXPERT : 3 QUESTIONS A...
Interview exclusive AEQUITAS & FIDES (06/2020)
Directeur des opérations Supply Chain et des projets de transformation
Dans un monde où l’impatience gagne chacun d’entre nous, l’incertitude n’a plus sa place : la fiabilité de l’information est nécessaire. Ce qui est transmis devient un engagement, la notion de service devient indispensable, elle est un atout concurrentiel.
Le monde industriel et l’univers de la distribution, n’échappent pas à cette règle. Mieux encore, il est de leur devoir d’accompagner cette évolution et les nouvelles attentes des clients.
Qui pour jouer ce rôle ? La Supply Chain, fonction centrale dans l’entreprise, la rend tout à fait légitime pour être le pilier de cette mutation. Les enquêtes de satisfaction montrent clairement la nécessité pour nos clients d’avoir une Supply Chain de plus en plus performante [Niveau 1 = la capacité à respecter nos engagements], et aussi de plus en plus différenciante [Niveau 1 = la compétitivité repose sur notre capacité à faire mieux que d’autres acteurs et plus (Offre exclusive)].
Sa vocation de contributeur de valeur : offrir un service client Premium permettant de « booster » l’activité commerciale, tout en maîtrisant ses coûts, la désigne comme un allié de tout premier plan.
La Supply Chain a emprunté une voie qui l’amène à une évolution permanente : l’acquis n’a pas sa place dans nos métiers et dans un contexte global (groupe multisites), elle doit accompagner les entreprises dans leurs croissances interne et externe.
Il nous appartient, logisticiens d’hier, acteurs de la Supply Chain d’aujourd’hui, de continuer à nous transformer pour répondre aux enjeux à court terme et aux défis à moyen et long termes.
S’imposer une transformation doit être un acte fondateur. Etablir une approche structurante et structurée est tout à fait en phase avec la méthodologie des acteurs de la Supply Chain :
Construire une cible* : ma recommandation est de cibler la finalité de la transformation d’une Supply Chain, à savoir rendre une organisation plus fiable, efficiente, agile, préventive, résiliente, écologique, structurée, connectée, collaborative et apprenante.
Après la construction de la cible, il est important de lister des contributeurs d’actions, éléments fédérateurs de performance [taux de service, vélocité du stock] comme, par exemple :
> Contributeur de Performance N° 1 => Décomplexifier notre process
Recenser et agir sur les facteurs de complexité [exemple : re-engineering]
> Contributeur de Performance N° 2 => Etablir une approche différentiée [exemple : Segmentation produits]
Une gamme hétérogène ne peut être gérée d’une manière homogène. Une approche « Evaluation Risques/Opportunités » doit nous permettre de hiérarchiser nos actions autour de projets (S&OP, One ERP) et autour des métiers (Master Planning Scheduler, Approvisionneur, Inventory champion, Manger Plateformes de distribution).
Règle d’or : notre stratégie, notre segmentation doivent être portées par nos ERP pour une transportabilité des informations avec les parties intéressées (fonctions internes et organisations externes).
> Contributeur de Performance N° 3 => Développer les individus
Pôle d’Excellence Supply Chain (compétences & comportements). La transformation de notre Supply Chain apporte un changement nécessitant un impact sur l’organisation. Une première approche est de définir les fonctions nécessaires (existantes ou non), qu’elles soient transversales (multisites) ou locales. Il est conseillé ensuite de mettre en place une matrice Compétences/Maturité pour
l’ensemble des métiers Supply Chain. Dans une approche GPEC, il convient alors, après avoir formalisé une bibliothèque de recueils « Bonnes Pratiques des métiers de la Supply Chain », de développer les compétences de vos équipes par une formation et un accompagnement, en veillant à l’homogénéité de la maturité sur l’ensemble des métiers.
Au-delà de cette approche, le responsable du projet doit veiller également à créer de la valeur en impulsant le changement au-delà du savoir-faire : développer des outils (Digitalisation) et générer des tâches à plus forte valeur.
La transformation doit, notamment, s’accompagner d’un changement d’approche : notre métier n’est-il pas plus intéressant si nous passons d’un mode réactif à une attitude proactive ?
La transversalité de notre métier nécessite une approche globale intégrant les acteurs de l’organisation ainsi que les acteurs externes (clients et fournisseurs).
Notre performance dépend grandement de notre capacité à mettre nos fournisseurs dans les meilleures dispositions de performance.
Si la réponse est apportée par nos clients, soit lors de visite de commerciaux, soit lors d’enquêtes de satisfaction, cela démontre que le résultat du projet a dépassé les frontières de l’entreprise et cette transformation est un succès. Il appartient à chaque entreprise d’en faire bon usage.
Le lancement d’un projet de transformation, en plus de satisfaire les clients, doit :
La réussite du projet est une œuvre collective : la capacité de faire travailler ensemble différents métiers, de décloisonner les fonctions est en soit un succès.
La conduite du changement opérée chez les acteurs peut se matérialiser par des évolutions de fonction et/ou de la promotion interne. Une récompense, quelle qu’elle soit, sera appréciée et perçue comme un acte fort.
Au-delà de ces données, peut-être est-ce la mission du porteur du projet de demander aux collaborateurs s’ils ont le sentiment d’avoir évolué dans leur fonction ets’ils appréhendent leur métier différemment.
En plus de ces informations riches d’enseignement, nous devons être dans une analyse factuelle de notre performance par des indicateurs mesurant la capacité de l’organisation à atteindre la cible et les objectifs formalisés lors de l’initialisation du projet de transformation.
Fabrice MOZON est Directeur des Opérations Supply Chain et des Projets Transformation. Il a passé les 25 dernières années à opérer dans différents types de secteurs d’activité (industrie automobile et aéronautique, luxe, distribution, paramédical) au sein d’environnements nationaux et internationaux et d’organisations matricielles et fonctionnelles. Parmi ses accomplissements, Fabrice a mis en place un Centre d’Excellence en Supply Chain via la GPEC, il a accru l’agilité des entreprises pour lesquelles il a travaillé en mutualisant les activités Supply Chain, mais il a aussi beaucoup œuvré pour digitaliser ces organisations (déploiement et migration d’ERP, mise en place de sites e-commerce, etc.). Avec une
approche projets très construite, Fabrice a largement participé aux stratégies Supply Chain développées via les plans de S&OP, la rationalisation des Achats et le Lean Manufacturing. Titulaire d’un diplôme d’ingénieur en Productique et Automatique Industriel, Fabrice a complété sa formation par un Executive Mastère en Achats et Supply Chain à HEC Paris. Il parle couramment anglais.